Dans les colonnes du quotidien Les Echos du 19 juin puis dans l’émission « les 4 vérités » de la matinale de France Télévision du 20 juin, Bruno LE MAIRE, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, sous couvert de financement de la transition écologique, a affirmé sa volonté de revenir sur la fiscalité des carburants pour plusieurs secteurs d’activité dont le transport routier. Le ministre a indiqué que de telles orientations avaient été actées à la suite de rencontres « avec les fédérations du secteur des transports routiers » qui « sont prêtes à s’engager dans cette démarche en vue du prochain projet de loi de finances ».
La FNTR, l’OTRE et l’Union TLF contestent ces déclarations laissant entendre qu’elles auraient acté ou accepté une hausse de la fiscalité des carburants.
Les pouvoirs publics ont loué le « rôle essentiel » du secteur du transport routier de marchandises durant la crise du Covid et lors des différents mouvements de grève.
Les professionnels du secteur ont été frappés de plein fouet par la crise des carburants, survenue au lendemain du déclenchement du conflit russo-ukrainien.
Dans ce contexte, et contrairement à nombre de voisins européens, notamment les transporteurs espagnols, les entreprises françaises n’ont pas obtenu la prolongation des aides au-delà du 31 décembre 2022, ni à la pompe, ni par véhicules.
Aussi, après six ans de contraintes accrues (Zones à Faibles Émissions, interdiction de commercialisation de véhicules Diesel, …), La FNTR, l’OTRE et l’Union TLF s’étonnent des décisions en préparation pour le prochain projet de loi de finances pour 2024.
En effet, les dernières prises de parole gouvernementales concordent non seulement vers un rabot de l’ex-TICPE (désormais fraction perçue en métropole sur les produits énergétiques, autres que les gaz naturels et les charbons), mais également un renforcement généralisé de la fiscalité, tant locale que nationale, pesant sur le secteur.
- La fin du remboursement partiel de l’ex-TICPE a certes été actée dans la loi Climat et Résilience, mais cette dernière dispose qu’une telle mesure est conditionnée à « la disponibilité de l’offre de véhicules et de réseaux d’avitaillement permettant le renouvellement du parc de poids lourds. Cette évolution s’accompagne d’un soutien renforcé à la transition énergétique du secteur du transport routier, notamment par le recours aux biocarburants dont le bilan énergétique et carbone est vertueux ». Cela n’est pas le cas, comme le démontrent les travaux de la feuille de route pour la décarbonation du transport routier qui confirment qu’une offre dense reposant sur un mix énergétique décarboné ne sera accessible au mieux qu’à partir de 2030 et que, faute d’une offre alternative fiable notamment en raison d’un réseau de distribution adapté à la mobilité lourde non planifié, les véhicules lourds diesel constitueront encore une partie non négligeable de la flotte d’ici 2040.
- Après les épisodes qu’a dû surmonter la filière et à l’heure où des aides pour le financement de la transition des flottes, qui requière des investissements importants, sont attendues il semble anachronique d’envisager simultanément un verdissement « progressif » de la fiscalité qui encouragerait la transition du secteur tout en y associant une fiscalité punitive ciblant les « tarifs réduits d’accises sur les transports routiers». Une telle mesure risquerait, en outre, de mettre en péril la compétitivité du pavillon français et de creuser les distorsions de concurrence avec les entreprises étrangères opérant sur le réseau routier français sans y consommer la moindre goutte de carburant.
- Les travaux de la feuille de route de décarbonation ont évalué le surcoût d’investissements pour atteindre les objectifs de trajectoire de la SNBC3 pour l’acquisition des véhicules et le développement du réseau d’avitaillement à 52,6 Md€ alors que la suppression du remboursement partiel de la TICPE est évaluée à 1,8 Md€. Les gains ainsi obtenus apparaissent marginaux au regard des besoins en financement de la transition énergétique alors que le rabot de cette ristourne aura une incidence forte sur l’équilibre financier des entreprises du secteur, fortement fragilisées depuis 2020.
Pour ces raisons et afin de ne pas affaiblir encore le secteur du transport routier, la FNTR, l’OTRE et l’Union TLF demandent solennellement à être reçus par Bruno LE MAIRE ou ses équipes, dans les meilleurs délais afin d’évoquer les perspectives d’évolution de la fiscalité s’appliquant à notre secteur.